Ecoliers et étudiants ont manifesté par milliers à travers le Liban

Ecoliers et étudiants ont manifesté jeudi par milliers à travers le Liban, théâtre d’un soulèvement inédit contre les dirigeants politiques, accusés de corruption et d’incompétence.
Sans s’essouffler, le mouvement de protestation est entré jeudi dans sa quatrième semaine. A travers tout le pays, les contestataires sont de mieux en mieux organisés, ralliant de nouvelles catégories sociales avec des initiatives qui visent à préserver l’ampleur de la mobilisation.
Depuis le 17 octobre, des centaines de milliers de personnes, toutes communautés confondues, ont battu le pavé pour dénoncer l’ensemble de la classe politique, dans un pays en proie à une grave crise économique.

Geste symbolique, des manifestants ont enlevé jeudi des affiches de soutien au Premier ministre démissionnaire Saad Hariri fixées à des lampadaires, qu’ils ont remplacées par des drapeaux libanais à Tripoli, grande ville du nord, sous les applaudissements de dizaines de personnes, a rapporté une correspondante de l’AFP.
Les manifestants ont appelé par mégaphone les habitants et les commerçants à aussi enlever les affiches sur les façades de leurs immeubles.
“Le message, c’est que Tripoli n’appartient à aucun leader”, lance Youssef Tikriti, jeune militant de 23 ans.
Plus tôt dans la capitale, plusieurs milliers d’écoliers et d’étudiants se sont rassemblés devant le ministère de l’Education, sacs à dos sur les épaules, allumant des fumigènes colorés et brandissant des drapeaux libanais.

“On rate nos cours pour pour vous donner une leçon”, peut-on lire sur la pancarte brandie par une jeune fille.
“On va à l’école, on se fatigue et au final on va décrocher des diplômes, les accrocher à la maison sans rien en faire, ni travailler”, déplore de son côté Marwa Abdel Rahmane, 16 ans.
Des cortèges estudiantins ont aussi défilé dans les rues de Beyrouth, rythmés par les applaudissements et les sifflements des jeunes.
Les contestataires ont obtenu le 29 octobre leur première victoire avec la démission de M. Hariri et son gouvernement –qui continue de gérer les affaires courantes en attendant la nouvelle équipe.
M. Hariri a été brièvement reçu jeudi par le chef de l’Etat Michel Aoun au Palais présidentiel de Baabda.
Les deux hommes ont mené des “consultations au sujet du (futur) gouvernement”, qui vont se poursuivre avec les autres parties, a souligné le chef du gouvernement à l’issue de la réunion.
Les manifestants entendent maintenir la pression jusqu’à obtenir un gouvernement de technocrates qui ne seraient pas issus du sérail politique traditionnel.

Outre Beyrouth et Tripoli, d’autres manifestations estudiantines ont eu lieu à travers le pays, notamment dans les villes majoritairement chiite de Nabatiyé et Baalbek, deux bastions du puissant mouvement du Hezbollah, selon l’agence de presse ANI.
Mercredi soir, des milliers de femmes se sont rassemblées sur la place des Martyrs au coeur de Beyrouth, tenant dans leurs mains des chandelles allumées. Accompagnées par les vivats de la foule, les manifestantes ont tapé sur des casseroles dans un joyeux tintamarre.

Les Libanais sont exaspérés par l’absence de services publics dignes de ce nom, avec notamment de graves pénuries d’eau et d’électricité.
La Banque mondiale a estimé mercredi que “l’étape la plus urgente” pour le Liban était “la formation rapide d’un gouvernement correspondant aux attentes de tous les Libanais”.
En cas d’impasse persistante, la moitié de la population pourrait sombrer dans la pauvreté et le chômage “augmenter fortement”, a averti l’institution, à l’issue d’une rencontre d’une délégation avec le président libanais Michel Aoun.
Selon la Banque mondiale, environ un tiers des Libanais vit déjà sous le seuil de pauvreté.
Ces derniers jours les autorités ont mis en avant les mesures adoptées pour illustrer leurs efforts dans la lutte anticorruption, sans parvenir à calmer la rue.
La justice a ordonné jeudi l’ouverture de nouvelles enquêtes dans des affaires de corruption ou de gaspillage de fonds publics présumés visant de hauts responsables, selon ANI.
Le parquet général a commandé une enquête concernant “tous les ministres des gouvernements successifs depuis 1990 à ce jour”, tandis que le procureur financier a engagé des poursuites contre le chef des douanes Badri al-Daher.
Le chef de l’Etat a assuré mercredi que le prochain gouvernement inclurait des “ministres compétents et à l’abri de tout soupçon de corruption”.

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