La justice russe envisage la dissolution de l’Agence juive

Le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré mardi que le cas de l’Agence juive était désormais examiné au niveau juridique.

Moscou déplorait mardi 26 juillet une «approche peu constructive» de la part des autorités israéliennes, voire des «déclarations antirusses», par l’intermédiaire de Maria Zakharova, porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe.

Dans la foulée de l’annonce de la probable dissolution de l’Agence juive, une délégation de législateurs et d’experts juridiques israéliens devait être envoyée en Russie afin de trouver un compromis et de «faire tous les efforts possibles pour épuiser le dialogue juridique». Sauf que Moscou refuse toujours de recevoir la délégation, laissant entrevoir une crise diplomatique durable. «Si la délégation est empêchée de voyager en Russie, la dissolution de l’Agence est inéluctable, à moins que des négociations discrètes ne soient entamées afin de parvenir à un accord», analyse David Khalfa, chercheur associé à l’Observatoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient de la Fondation Jean-Jaurès. «La fermeture des bureaux de l’Agence juive serait un incident grave, qui affectera les relations entre les deux pays», a d’emblée affirmé le Premier ministre israélien par intérim Yaïr Lapid, dont le discours à l’égard du Kremlin est bien plus critique celui de son prédécesseur Naftali Bennett, qui avait été contraint à la démission fin juin après l’effondrement de la coalition.

Depuis le 24 février et l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les tensions entre Moscou et Tel-Aviv se sont exacerbées, à tel point que le 21 juillet, un tribunal moscovite a indiqué que le ministère russe de la Justice demandait la dissolution de l’agence, pour «violation de la loi russe dans l’exercice de ses activités», sans plus de précisions. La décision devrait être confirmée jeudi 28 juillet.

Après l’invasion russe de l’Ukraine, Israël a d’abord adopté une position prudente, «neutre», voire «équilibriste», selon David Khalfa, une position affichée par Bennett. S’il a condamné la violence en Ukraine, il s’est cependant abstenu de s’en prendre frontalement au président russe, maintenant les liaisons aériennes entre les deux pays qui continuent jusqu’à ce jour à opérer. Au début du conflit, Naftali Bennett avait même essayé de s’imposer comme médiateur et avait voyagé en urgence à Moscou, puis à Berlin, pour tenter d’obtenir un cessez-le-feu. En vain.

Pourtant, les frictions entre les autorités russes et l’Agence juive, organisation à but non lucratif présente sur le territoire depuis 1989, ne sont pas nouvelles. L’argument juridique a souvent été évoqué. Depuis trois décennies, ses salariés affrontent régulièrement des audits surprises, des interrogatoires et reçoivent des amendes pour des violations techniques. L’Agence juive a joué un rôle essentiel en aidant plus de 238 000 juifs à émigrer depuis 1989 de Russie en Israël, où la population russophone s’élève à un million de personnes.

«La fermeture de l’Agence juive vise à punir la société civile russe, et s’inscrit dans un contexte plus large, où depuis le début des hostilités, Poutine a ordonné la dissolution de toutes les organisations en lien avec l’étranger», rappelle Ksenia Svetlova, qui y voit aussi une tentative d’atteindre spécifiquement Israël. «Cette décision intervient après la visite de Poutine en Iran, et celle de Joe Biden en Israël, le timing de la crise n’est pas une coïncidence.» Au-delà de la guerre en Ukraine, les différends entre Tel-Aviv et Moscou concernent l’église Alexandre Nevsky à Jérusalem, dont les Russes réclament la gestion.

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