Yémen: un air d’indépendance souffle sur Aden, après des combats meurtriers

Reflet de la nouvelle réalité politique à Aden, le drapeau bleu, blanc et noir, frappé d’une étoile rouge, de l’ancien Yémen du Sud, flotte partout, confirmant le passage de la ville sous contrôle du CTS.

Des combats meurtriers –40 morts et 260 blessés selon l’ONU– la semaine dernière dans cette grande ville du Sud ont vu les forces du Conseil de transition du Sud (STC) prendre le dessus sur les troupes gouvernementales.

Le gouvernement du président Abd Rabbo Mansour Hadi a crié au “coup d’Etat” et son allié dans la lutte contre les rebelles Houthis –qui contrôlent la capitale Sanaa–, la coalition menée par l’Arabie saoudite, a joué les pompiers.

Elle a envoyé à Aden une délégation militaire composée également d’Emiratis, alliés des Sudistes, qui a obtenu un retrait de ces derniers de bâtiments publics mais pas de positions militaires.

Le président Hadi a appelé lundi ses concitoyens à “se tenir derrière la direction légitime (du pays) et ses institutions officielles, et rejeter tous les projets destructeurs” du CTS.

Alors que la vie a repris dans la ville, les habitants jubilent mais disent aussi craindre des pénuries dans les services publics.

“Nous avons un souci majeur: qui va assurer les services publics et qui va payer les salaires de dizaines de milliers de fonctionnaires ?” se demande un habitant, Saleh Nasr.

“Si le STC est capable de le faire, nous sommes avec lui”, dit-il à l’AFP.

Un autre habitant, Saleh al-Haïj, formule l’espoir de voir les sudistes améliorer les services publics.

“Il y a des pénuries d’eau et d’électricité”, constate cet homme qui porte un t-shirt frappé du portrait du chef du STC, Aidarous al-Zoubaidi.

Le mouvement sudiste a pris de l’ampleur à Aden et dans le Sud en général bien avant le conflit provoqué par la prise de Sanaa par les Houthis en 2014. Il a été alimenté par le sentiment que cette région a été négligée depuis sa fusion avec le Nord en 1990.

– “Rétablir l’ordre” –

En janvier 2018, les mêmes protagonistes s’étaient affrontés dans la ville. Les combats avaient fait 38 morts et 220 blessés et n’avaient cessé qu’après une intervention de la coalition menée par Ryad.

“Le peuple du Sud te soutient”: la banderole géante, avec le portrait du chef du STC le bras levé, a été accrochée à un bâtiment de plusieurs étages dans le centre-ville.

“Nous sommes avec le STC mais il doit rétablir l’ordre et s’imposer sur le terrain”, souligne un autre habitant, Mahmoud Salah.

Les forces du STC, formées et encadrées par les Emirats arabes unis et connues sous le nom de “Cordon de sécurité”, ont érigé de nombreux points de contrôle dans la ville et filtrent les voitures.

Malgré leur alliance, les Emiratis semblent pencher pour les sudistes tandis que les Saoudiens soutiennent le gouvernement de M. Hadi, reconnu par la communauté internationale.

Ce gouvernement exige, avant de participer à une réunion avec le STC proposé par Ryad, un retrait total des forces du CTS des positions prises aux soldats loyalistes.

Une telle réunion pourrait offrir aux sudistesl’occasion d’obtenir une meilleure représentation dans un nouveau gouvernement yéménite ainsi que la prise en compte de leur revendication d’une large autonomie, selon des observateurs.

En attendant, une autre catégorie de Yéménites a de quoi s’inquiéter, celle des habitants d’Aden originaires du Nord.

“Nous craignons d’être expulsés”, déclare un nordiste, Mohammed Abdallah, en soulignant que de nombreuses personnes comme lui ont “des biens et des emplois dans le Sud”.

Avant les derniers combats, le Haut commissariat des Nations unies pour les droits de l’Homme avait déjà dénoncé le 6 août des exactions des forces de l’ordre dans le sud du Yémen, commises contre des Yéménites originaires du Nord.

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