La Chine menace Washington après l’adoption d’une loi sur les Ouïgours

Après le sort des manifestants pro-démocratie de Hong Kong, le Congrès américain se mobilise en faveur de celui des Ouïgours, provoquant l’ire immédiate de Pékin qui a menacé de représailles. La Chambre américaine des représentants a adopté à une majorité écrasante un projet de loi visant à contraindre l’administration Trump à imposer des sanctions contre de hauts responsables chinois, en réponse aux « détentions arbitraires de masse » de cette minorité musulmane de la province chinoise du Xinjiang.
Version amendée d’un texte adopté au Sénat en septembre, le projet de loi devrait être rapidement et largement adopté par les sénateurs, avant d’être envoyé à Donald Trump pour qu’il accepte ou non de le promulguer. « Aujourd’hui, la dignité et les droits humains des Ouïgours sont menacés par les actes barbares de Pékin, qui sont une insulte à la conscience collective mondiale », a déclaré dans l’hémicycle la présidente démocrate de la Chambre, Nancy Pelosi, avant le vote. « Nous envoyons un message à Pékin : l’Amérique observe et ne restera pas silencieuse. »

Le texte demande au chef de la Maison-Blanche de condamner les atteintes aux droits de la minorité musulmane, d’appeler à la fermeture des camps de « rééducation » du Xinjiang et de sanctionner les responsables de cette répression, parmi lesquels Chen Quanguo, secrétaire du Parti communiste pour le Xinjiang. Il exhorte également le ministère du Commerce américain à interdire certaines exportations, notamment de matériels pouvant aider à la surveillance de masse des Ouïgours.
Des ONG et des experts estiment que Pékin aurait interné de 1 à 1,8 million de musulmans dans des camps au Xinjiang. Ces dernières semaines, de nombreux documents officiels chinois révélés par le « New York Times » et un groupement de médias internationaux (« Le Monde », en France) ont attesté de l’existence de ces camps et du système répressif décidé par le président , Xi Jinping. Pékin récuse les estimations et évoque des « centres de formation professionnelle » destinés à lutter contre la radicalisation islamiste et le terrorisme. Le ministère chinois des Affaires étrangères a qualifié le projet de loi américain d’attaque « malveillante » contre la Chine et de grave ingérence dans les affaires internes du pays. Leurs auteurs « devront en payer le prix », a averti son porte-parole.

Pékin n’a pas détaillé les mesures de représailles envisagées. Les médias d’Etat chinois ont averti que le gouvernement allait publier une liste d’« entités non fiables » pouvant conduire à des sanctions contre les sociétés américaines.

Le projet de loi sur les Ouïgours intervient moins d’une semaine après la promulgation, par Donald Trump, d’une loi soutenant les manifestants pro-démocratie à Hong Kong , à laquelle Pékin a répliqué par des sanctions surtout très symboliques contre des ONG de défense des droits de l’Homme et l’interdiction de visite de la marine américaine à Hong Kong.
L’offensive du Congrès américain risque de perturber les négociations commerciales en cours sur le montant des tarifs douaniers qui seraient annulés dans le cadre d’un accord partiel. Le temps presse : Washington a fixé au 15 décembre une éventuelle nouvelle hausse des sanctions douanières américaines, ce qui accentuerait considérablement les tensions entre les deux pays.
Cherchant à ne pas hypothéquer les chances d’un accord, Pékin est resté mesuré jusque-là dans ses contre-mesures, en dépit de son discours enflammé. De son côté, Donald Trump n’est pas à l’origine des textes du Congrès sur Hong Kong et le Xinjiang et les a signés du bout des doigts, ne pouvant se permettre de s’opposer au Congrès en pleine procédure d’« impeachment » . « Je n’ai pas de date limite » pour un accord commercial avec la Chine, a indiqué mardi le chef d’Etat américain, en marge du sommet de l’Otan à Londres , n’excluant pas un délai au-delà de l’élection de 2020. Une façon de minimiser l’urgence d’un accord. Ou une posture de négociation.

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